COVID-19: La réduction de l’horaire de travail (RHT) en 5 questions-réponses


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Compte tenu des mesures prises par les autorités suisses en lien avec le coronavirus, certaines entreprises pourraient envisager de recourir au chômage partiel, appelé aussi “réduction de l’horaire de travail” (RHT), prévu aux art. 31 ss de la Loi sur l’assurance-chômage (LACI). Jusqu’à présent, environ deux millions de travailleurs sont ou ont été concernés par le chômage partiel en raison du coronavirus, ce qui fait de cet outil un élément clé dans la lutte contre les conséquences négatives de l’épidémie sur notre économie.

Cet article est aussi disponible en anglais et en allemand.

Nous répondons ici à cinq questions pratiques en lien avec la RHT (état au 26 janvier 2021).

1. Les entreprises peuvent-elles bénéficier des indemnités RHT en lien avec le coronavirus?

Lorsque l’activité des employés de l’entreprise est suspendue ou réduite en raison des mesures prises par les autorités ou d’autres circonstances indépendantes de la volonté de l’employeur, ou pour des raisons économiques ou conjoncturelles (p.ex. baisse du carnet de commandes ou du chiffre d’affaires), l’employeur peut bénéficier d’une indemnité RHT si toutes les conditions suivantes sont remplies :

  • la perte de travail est vraisemblablement temporaire et l’on peut s’attendre à ce que le soutien de l’Etat sous forme de réduction de l’horaire de travail permette de maintenir les emplois ;
  • l’horaire de travail est contrôlable ;
  • la perte de travail constitue au moins 10% de l’ensemble des heures de travail normalement effectuées par les travailleurs au cours de la période pour laquelle le décompte est établi ;
  • la perte de travail n’est pas imputable à des circonstances qui relèvent du risque normal d’exploitation de l’employeur ;
  • les employés concernés consentent à cette mesure (dès lors qu’ils renoncent à une partie de leur salaire).

En outre, il doit exister un rapport de causalité adéquat entre la perte de travail et l’apparition du virus. Une référence générale au coronavirus ne suffit pas à justifier un droit à l’indemnité.

2. Qui a droit à une indemnité RHT selon les nouvelles directives?

Le Conseil fédéral avait étendu en plusieurs étapes le champ d’application du chômage partiel dans le cadre de ses mesures de lutte extraordinaires en lien avec l’épidémie du COVID-19. Le champ d’application étendu s’appliquait rétroactivement dès le 1er mars 2020 et était limité au 31 août 2020. En dérogation à ce que prévoit la Loi fédérale sur l’assurance-chômage, le paiement d’une indemnité est admis durant cette période pour les personnes suivantes, qui d’ordinaire ne peuvent pas y prétendre :

  • les travailleurs avec un contrat à durée déterminée ;
  • les intérimaires ;
  • les apprentis (le droit à l’indemnisation a pris fin le 31 mai 2020) ;
  • les personnes qui fixent les décisions que prend l’employeur – ou peuvent les influencer considérablement – en qualité d’associé, de membre d’un organe dirigeant de l’entreprise ou encore de détenteur d’une participation financière à l’entreprise, ainsi que leur conjoint, avec néanmoins des limitations dès lors que ces personnes peuvent uniquement bénéficier d’un montant forfaitaire limité à CHF 3’320.- par mois (pour un équivalent plein-temps) et le droit à l’indemnisation prend fin le 31 mai 2020;
  • les travailleurs sur appel dont le taux d’occupation mensuel est soumis à de fortes fluctuations (plus de 20 %), pour autant qu’ils soient employés depuis plus de six mois par l’entreprise faisant appel au chômage partiel.

Les employés qui suspendent leur activité professionnelle pour des motifs personnels tels que la maladie, la peur de contracter le virus ou des obligations familiales (p. ex. pour s’occuper d’un membre de la famille malade ou des enfants suite à la fermeture des écoles et des crèches) n’ont pas droit à une indemnité RHT.

A noter que les travailleurs étrangers actifs sur le territoire suisse ont également droit à l’indemnité indépendamment de leur lieu de domicile et de leur statut de séjour pour autant qu’ils soient soumis au système de sécurité sociale en Suisse. Ainsi, les travailleurs frontaliers, par exemple, ont droit à l’indemnité en cas de RHT dès le premier jour où ils exercent une activité soumise aux cotisations de l’assurance-chômage en Suisse et s’ils remplissent les autres conditions du droit à l’indemnité. En revanche, les travailleurs détachés dans d’autres pays par un employeur suisse pour une longue durée ne bénéficient pas du chômage partiel.

À compter du 1er septembre 2020, le champ d’application étendu ne s’applique plus dans la même mesure. En lieu et place, les dispositions légales des art. 31 à 33 LACI sont à nouveau applicables de manière générale. Une exception est maintenue concernant la charge de travail des personnes responsables de la formation des apprentis, si l’entreprise prouve que la formation des apprentis ne peut plus être assurée en raison d’un encadrement insuffisant (voir l’art. 8j de l’Ordonnance COVID-19 assurance chômage). Ces heures de travail consacrées à la formation des apprentis doivent être considérées comme une perte de travail à indemniser et ne doivent donc pas être prises en compte comme des heures de travail effectuées dans le cadre de la demande d’indemnisation. Par ailleurs, le champ d’application élargi pour les travailleurs sur appel reste applicable (voir art. 8f de l’Ordonnance COVID-19 assurance chômage).

Le 20 janvier 2020, le Conseil fédéral a décidé d’étendre à nouveau les mesures et de modifier certains articles de l’Ordonnance COVID-19 assurance chômage. Dans cette perspective, le champ d’application de ladite Ordonnance a été à nouveau élargi afin d’englober les employés avec un contrat à durée déterminée et les apprentis. Cet élargissement est en vigueur pour la période allant du 1er janvier 2021 au 30 juin 2021 (cf. art. 4 de l’Ordonnance COVID-19 assurance chômage). Les apprentis ont quant à eux uniquement droit à l’indemnité en cas de RHT si leur formation continue à être assurée, si l’entreprise a été fermée à cause d’une décision des autorités et si aucun autre soutien financier n’est perçu pour couvrir le salaire des apprentis.

3. Quel est le montant et la durée de l’indemnité?

L’indemnité est de 80 % de la perte de gain prise en considération. A titre d’exemple, si les heures de travail sont réduites de 100%, le 80% du salaire sera couvert. Le gain maximal assuré est de CHF 148’200 par an.

En l’espace de deux ans, la RHT est versée au maximum pendant douze mois jusqu’au 31 août 2020 (complets ou entamés). Le Conseil fédéral a décidé d’étendre la durée maximale de la compensation à 18 mois, à partir du 1er septembre 2020 et jusqu’au 31 décembre 2020..Le Conseil fédéral avait d’abord supprimé la limitation à quatre mois du droit à l’indemnité pour les entreprises affichant une réduction de l’horaire de travail supérieure à 85% jusqu’au 31 août 2020. Il a ensuite prolongé cette limitation jusqu’au 31 mars 2021. À partir du 1er septembre 2020, les dispositions légales habituelles s’appliquent à nouveau. Toutefois, la période de décompte allant du 1er mars 2020 au 31 mars 2021 pour laquelle une perte d’heures de travail excédant 85 % est constatée n’est pas comptabilisée dans la période maximale de quatre mois.

À noter qu’après avoir été abaissé à un jour dans un premier temps, le délai d’attente prévu dans la loi (trois jours maximum) a été entièrement supprimé par le Conseil fédéral, avec effet rétroactif à compter du 1er mars 2020. Cette réglementation était initialement applicable jusqu’au 31 août 2020. Toutefois, le Conseil fédéral a décidé en date du 20 janvier 2021 d’étendre ses effets jusqu’au 31 mars 2021. Les employeurs ne doivent cependant effectuer aucune modification : le formulaire de demande d’indemnité sera adapté par la caisse chômage et la potentielle différence sera directement versée à l’entreprise concernée.

4. Comment obtenir une indemnité?

a. Calculer le taux de réduction de l’horaire de travail probable pour chaque employé concerné. La réduction de l’horaire de travail doit atteindre au moins 10 % des heures à effectuer normalement par l’ensemble des employés éligibles à percevoir une indemnité RHT, une fois déduites les absences payées et non payées.

b. Communiquer le préavis de RHT à l’office cantonal compétent, à savoir celui du canton dans lequel l’entreprise ou la partie d’entreprise concernée est située. Pour les sociétés disposant de sites de vente dans différents cantons, le préavis doit être déposé pour tous les employés dans le canton du siège de la société.

Le préavis de RHT peut désormais être soumis directement au moyen d’un formulaire électronique (disponible en allemand, français et italien) fourni par les E-services de Jobroom (SECO). L’organigramme de l’ensemble de l’entreprise doit être joint ou téléchargé sous forme de document PDF. Si le préavis ne concerne qu’une unité d’entreprise, il convient de noter que le nombre d’employés par unité d’entreprise doit également être mentionné sur l’organigramme.

Si une demande en ligne n’est pas possible, le préavis peut toujours être soumis à l’autorité cantonale compétente par courriel ou par pli postal, en utilistant le formulaire spécifique lié au coronavirus

Le préavis RHT doit en principe exposer, respectivement justifier, les raisons pour lesquelles les pertes de travail attendues sont à mettre sur le compte de l’apparition du coronavirus.

Une demande rétroactive n’est pas envisageable. Jusqu’au 31 mai 2020, la RHT pouvait commencer dès la communication du préavis car le Conseil fédéral avait supprimé le délai d’attente de 10 jours prescrit par la loi. En revanche, pour les préavis de RHT soumis à partir du 1er juin 2020, le chômage partiel ne débutera qu’à l’échéance du délai de dix jours.

Jusqu’au 31 août 2020, une demande était valable pour une durée maximale de six mois (la durée légale de trois mois ayant été prolongée par le Conseil fédéral) et devait être renouvellée si la situation de RHT persistait. Avec la supression de toutes les facilitations à partir du 1er septembre 2020, la période d’approbation maximale de trois mois s’applique à nouveau. En conséquence, les autorisations de RHT qui, à cette date, étaient déjà valables depuis plus de trois mois, ont perdu leur validité. De plus, les autorisations accordées pour une plus longue durée ont été réduites à une période de trois mois. Si la RHT se poursuit au-delà du 1er septembre 2020 ou après l’expiration de la période de validité de l’autorisation, l’entreprise doit présenter un nouveau préavis.

c. Solliciter le versement des indemnitésauprès de la caisse de chômage de votre choix en soumettant le formulaire éléctronique (identification requise) ou le formulaire spécifique, accompagné de tous les documents utiles. Si une demande en ligne n’est pas possible, le formulaire peut être soumis par courriel ou par pli postal. Avant de soummettre le formulaire, nous vous recommandons de consulter le site web de la caisse de chômage sélectionnée, dès lors que certaines caisses requièrent des formulaires et/ou des documents supplémentaires. Pour que les paiements puissent être effectués le plus rapidement possible, la perte de travail à indemniser est calculée selon une procédure sommaire: la perte de travail total subie en lien avec la situation actuelle est mise en rapport avec la somme des revenus déterminants de toutes les personnes ayant droits. La perte de travail doit être attestée au moyen de justificatifs appropriés (p.ex. liste d’heures et journal des salaires). De plus amples informations concernant le décompte à effectuer sont disponibles ici. La procédure sommaire reste applicable jusqu’au 31 mars 2021.

Ensuite d’une modification émanant du Conseil fédéral, les revenus provenant d’un emploi intérimaire ou d’une activité indépendante ne doivent pour l’heure plus être déclarés à l’employeur et ne sont donc pas déduits de l’indemnité de RHT. En outre, les heures supplémentaires effectuées en dehors des périodes de chômage partiel ne doivent pas être déduites du temps de travail réduit. Ces deux exceptions s’appliquent jusqu’au 31 mars 2021.

Afin de soulager les entreprises à court de liquidités, le Conseil fédéral a prévu que les salaires dus pourront au besoin être réglés au moyen d’une avance sur les indemnités à recevoir. Les modalités précises d’une telle avance n’ont néanmoins pas été définies. Les entreprises nécessitant une avance doivent donc se renseigner à ce sujet auprès de la caisse de chômage qu’ils ont choisie.

De plus, la Loi COVID-19 adoptée par le Parlement en date du 25 septembre 2020 inclut des dispositions qui augmentent le montant de l’indemnité allouée en cas de RHT. Selon l’art. 17a de la Loi COVID-19, tous les employés qui touchent un salaire mensuel de plus de CHF 3’470.- par mois ont le droit de percevoir 100% des indemintés RHT (au lieu de 80%). De plus, pour les employés dont le salaire se situe entre CHF 3’470.- et 4’340.-, l’indemnité pour RHT se monte à CHF 3’470.- en cas de réduction complète de l’horaire de travail. Si les heures de travail sont diminuées en partie seulement durant la phase de RHT, l’indemnité sera calculée propotionnellement. La compensation ordinaire de 80% des heures de travail réduites s’applique en conséquence à tous les employés dont le salaire dépasse CHF 4’340.-. Cette disposition s’applique rétroactivement depuis le 1er décembre 2020 et jusqu’au 31 mars 2021.

Enfin, il sied de noter que le droit à l’indemnité s’éteint s’il n’est pas exercé dans les 3 mois suivant la période revendiquée.

5. Quelles sont les obligations de l’employeur?

L’employeur a l’obligation de :

  • verser à l’employé, à la date de paie habituelle, un montant correspondant à 80% de la perte de gain liée à la réduction de l’horaire de travail (tout en respectant le salaire maximum assuré de CHF 148’200). En cas de réduction partielle de l’horaire de travail (p.ex. passage de 100% à 50%), l’employeur devra verser à l’employé le salaire complet correspondant à la part réduite (50%), additionné du 80% de la part perdue (80% de 50% = 40%), soit dans le cas d’espèce un total à payer de 90% du salaire habituel (cf. art. 17a de de la Loi COVID-19 pour les salaires jusqu’à CHF 4’340.-, voir Question 4);
  • continuer à payer intégralement les cotisations aux assurances sociales (selon les dispositions légales et contractuelles, comme si le salaire et la durée de travail étaient normaux) – il est toutefois précisé qu’en l’état des décisions prises par les autorités fédérales, le paiement de ces cotisations peut être différé sans intérêts pendant une certaine durée ;
  • enregistrer et contrôler les heures de travail quotidien et les absences. Les employés doivent donc être tenus de déclarer quotidiennement les heures travaillées, y compris les heures supplémentaires, et toutes les autres absences telles que les congés, la maladie, les accidents ou le service militaire. Le temps de travail doit être contrôlable en tout temps ;
  • collaborer gratuitement à la mise en œuvre de la loi et fournir à la caisse de chômage tous les renseignements dont elle a besoin pour déterminer le droit à l’indemnité et en calculer le montant ;
  • demander le versement des indemnités dès que possible mais au plus tard dans les 3 mois suivant la période revendiquée ;
  • obtenir le consentement de chaque employé concerné par la RHT ou, le cas échéant, de la représentation des travailleurs ;
  • conserver tous les documents pendant 5 ans.

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