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La crise actuelle du COVID-19 a un impact dramatique sur tous les aspects de l’économie suisse. De nombreux secteurs d’activités connaissent un arrêt complet (par ex. : les restaurants, les bars, les cinémas, etc.) ou font face à une diminution rapide de la demande et/ou des recettes (par ex. : commerce de détail, hôtels, etc.). La crise n’affecte pas uniquement le personnel existant des entreprises touchées, mais également leur recrutement. Pour cette raison, nous examinons ci-après quelques questions pratiques concernant les sujets suivants :
- Impacts sur les processus de recrutement
- Indemnité en cas de réduction de l’horaire de travail
- Licenciement avant le début de l’emploi et impacts sur le temps d’essai
- Télétravail
A) Impacts du COVID-19 sur les processus de recrutement
Notre société est active dans un secteur où le taux de chômage national est d’au moins 5%. Sommes-nous tenus d’annoncer les postes vacants au service de l’emploi?
Non. Depuis le 1er janvier 2020, les employeurs sont tenus d’annoncer aux offices régionaux de placement (ORP) tous les postes à pourvoir dans les genres de profession où le taux de chômage national atteint ou dépasse le seuil de 5%. Toutefois, l’obligation d’annoncer les postes vacants a été suspendue par le Conseil fédéral par l’ « Ordonnance COVID-19 obligation d’annoncer les postes vacants » avec effet pendant six mois à compter du 26 mars.
Nous employons des ressortissants étrangers et des travailleurs frontaliers. En outre, nous envisageons d’engager des ressortissants étrangers domiciliés à l’étranger pour des postes en Suisse. Dans quelle mesure sommes-nous affectés par la législation actuelle ?
En lien avec l’épidémie du COVID-19, le Conseil fédéral a décidé d’imposer des restrictions de grande envergure à l’immigration.
En principe, les étrangers (citoyens de l’UE/AELE ainsi que les ressortissants d’Etats tiers), qui ne sont pas titulaires d’un permis de séjour ou de travail valable, ne seront autorisés à entrer sur le territoire suisse pour y travailler que si un intérêt public prépondérant le justifie (par exemple, les travailleurs actifs dans la fourniture de biens de première nécessité, la santé, l’agriculture, la technologie et l’information ainsi que la recherche scientifique). Une autorisation de séjour, voire d’une garantie qu’une autorisation, sera délivrée à ces travailleurs pour entrer en Suisse.
Toutefois, comme les mesures prises dans le cadre de la pandémie COVID-19 sont actuellement progressivement assouplies par le Conseil fédéral, les exceptions suivantes s’appliquent :
a. Les demandes d’autorisation de séjour ou de permis frontalier pour les travailleurs des Etats de l’UE et AELE seront traitées par les autorités cantonales même s’il n’y a pas d’intérêt public prépondérant, si la demande d’autorisation de séjour ou de permis frontalier a été déposée avant l’introduction des restrictions d’entrée, c’est-à-dire avant le 25 mars 2020, ou si le contrat de travail avec un employeur en Suisse a été conclu avant le 25 mars 2020.
Pour les ressortissants d’Etats tiers, qui disposent déjà d’un permis de travail mais qui n’ont pas obtenu de visa en raison des restrictions d’entrée, seront désormais autorisés à entrer en Suisse. Ces derniers, ou leur employeur, doivent contacter les autorités cantonales compétentes en matière de population et migration afin de mettre à jour leur autorisation d’entrer en Suisse. En outre, les demandes d’autorisation d’employer des ressortissants d’Etat tiers, qui ont été déposées avant l’entrée en vigueur des restrictions le 18 mars 2020, seront désormais traitées. Elles seront approuvées à condition que les conditions de la Loi sur les étrangers et l’intégration (LEI) soient remplies et que la personne concernée soit effectivement en mesure de commencer le travail.
b. Les autres demandes de permis de travail présentées après le 18 mars 2020, pour des ressortissants d’Etat tiers, ne résidant pas actuellement en Suisse, ne seront pas traitées pour le moment.
B) Indemnité en cas de réduction de l’horaire de travail
Notre entreprise a déposé une demande d’indemnité en cas de réduction de l’horaire de travail pour ses employés actuels. Toutefois, avant la crise, nous avons engagé de nouveaux employés, débutant prochainement. Ont-ils droit à cette indemnité ?
Les employés ont droit à une indemnité en cas de réduction de l’horaire de travail dès le premier jour d’exercice d’une activité soumise aux cotisations de l’assurance-chômage, pour autant qu’ils remplissent les conditions d’octroi d’une telle indemnité (veuillez-vous référer à notre article sur la réduction de l’horaire de travail pour plus d’informations concernant lesdites conditions).
Nous avons engagé un-e nouvel-le employé-e dont le domicile est à l’étranger, titulaire d’un permis pour frontalier (permis G). L’employé-e doit entrer en fonction prochainement. Le/La nouvel-le employé-e a-t-il/elle le droit à l’indemnité en cas de réduction de l’horaire de travail bien qu’il/elle soit un travailleur frontalier ?
Les travailleurs étrangers travaillant en Suisse ont également le droit à l’indemnité indépendamment de leur lieu de résidence et de leur statut de résident, à condition qu’ils sont assujettis au système de sécurité sociale suisse. Les travailleurs frontaliers, par exemple, ont droit à une indemnité en cas de réduction de l’horaire de travail dès le premier jour où ils commencent une activité soumise aux cotisations de l’assurance-chômage suisse, pour autant qu’ils remplissent les conditions d’octroi de l’indemnité (veuillez-vous référer à notre article sur la réduction de l’horaire de travail pour plus d’informations concernant lesdites conditions générales).
Notre entreprise a déposé une demande d’indemnité en cas de réduction de l’horaire de travail pour ses employés. Nous avons maintenant reçu une demande très convaincante d’un-e candidat-e et nous souhaitons l’embaucher. A-t-il/elle le droit à l’indemnité en cas de réduction de l’horaire de travail ?
Si de nouveaux employés sont embauchés alors qu’il est prévisible qu’ils ne peuvent pas encore travailler en raison de la situation liée au COVID-19, ils n’auront en principe pas le droit à une indemnité en cas de réduction de l’horaire de travail. Dans un tel cas, la cause principale de la réduction du temps de travail de ces employés n’est pas le COVID-19, mais l’engagement volontaire de nouveaux employés malgré les circonstances économiques actuelles. Par conséquent, ces nouveaux engagements sont au risque de l’employeur.
C) Licenciement avant le début de l’emploi et impacts sur le temps d’essai
Nous avons engagé un-e nouvel-le employé-e, débutant le 1er mai 2020. Cependant, notre entreprise a dû fermer en raison de la situation actuelle et nous ne pouvons plus occuper l’employé-e. Est-il possible de mettre fin au contrat de travail avant l’entrée en fonction ?
En principe, un congé est admissible même avant la date d’entrée en fonction convenue contractuellement, c’est-à-dire avant que l’employé-e n’ait commencé à travailler. Selon la doctrine majoritaire, le délai de congé applicable pendant le temps d’essai devrait s’appliquer. Sauf accord contraire entre les parties, il s’agit en principe d’une période de sept jours.
Selon nous, le délai de congé commence à courir dès la réception du congé, c’est-à-dire avant même le début effectif de l’emploi. Par conséquent, aucun salaire ne sera dû dans l’hypothèse où le délai de congé expire avant le premier jour de travail. Cependant, veuillez noter que ce point de vue n’a pas encore été confirmé par le Tribunal fédéral. Une partie de la doctrine soutient que le délai de congé ne commence à courir qu’à partir du premier jour de travail, de sorte que l’employeur est tenu de verser le salaire pour la durée du délai de congé (qui, comme mentionné, est plus court durant le temps d’essai).
Dans l’hypothèse où le contrat de travail exclu expressément l’application d’un temps d’essai, il est également possible de résilier le contrat déjà avant le premier jour de travail. Toutefois, le délai de congé contractuel, ou à défaut, le délai de congé légal (un mois au cours de la première année de service), s’applique. De plus, en l’absence d’un temps d’essai, les délais prescrits à l’art. 336c CO s’appliquent, ce qui signifie qu’aucun congé n’est possible durant une incapacité de travail due à une maladie ou un accident, une grossesse, une période de 16 semaines qui suit l’accouchement, ou un service militaire ou de protection civile.
Nous avons engagé un-e nouvel-le employé-e. Un temps d’essai de trois mois est prévu dans le contrat de travail. Pour l’instant, notre entreprise est fermée et nous ne pouvons pas évaluer le travail et le comportement de l’employé-e. Le temps d’essai sera-t-il prolongé ?
Selon l’art. 335b al. 3 CO, la période qui constituerait normalement le temps d’essai est prolongée si elle a été interrompue par suite de maladie, d’accident ou d’accomplissement d’une obligation légale incombant au travailleur sans qu’il ait demandé de l’assumer (par ex. : service militaire ou service civil). Les motifs listés à l’alinéa 3 sont exhaustifs. Par conséquent, le temps d’essai ne peut pas être prolongé.
Un temps d’essai de trois mois est prévu dans le contrat de travail d’un-e nouvel-le employé-e. Après deux semaines, l’employé-e tombe malade et est été testé-e positif/ve au COVID-19. Il/elle est en arrêt maladie pendant deux semaines. Le temps d’essai sera-t-il prolongé ?
Oui, comme mentionné ci-dessus. Si le temps d’essai a été interrompu pour cause de maladie, il sera prolongé en conséquence, c’est-à-dire de deux semaines.
Nous avons engagé un-e nouvel-le employé-e qui est censé-e prendre ses fonctions dans une semaine. En raison de la crise, nous n’allons pas être en mesure de fournir du travail à l’employé-e. Est-il possible de modifier le début de son contrat de travail ?
Des modifications unilatérales d’un contrat de travail ne sont généralement pas admissibles en droit suisse. Cependant, les deux parties contractantes sont libres de modifier mutuellement leur relation contractuelle en tout temps. Par conséquent, dans cette situation, l’employeur devrait prendre contact avec l’employé-e et négocier une nouvelle date de début du contrat de travail. Toutefois, le report de la date de début du contrat retarderait également l’éventuel droit de l’employé-e à des indemnités en cas de réduction de l’horaire de travail.
D) Télétravail
Notre secteur d’activité ne permet pas à nos employés de travailler à domicile. Toutefois, nous respectons les recommandations fédérales en matière d’hygiène et de distance sociale au travail. Un-e nouvel-le employé-e nous a contacté et nous a indiqué souffrir d’une maladie sous-jacente. Cette maladie n’affecte normalement pas sa capacité à travailler mais fait qu’il/elle se trouve dans le groupe des personnes vulnérables au regard du COVID-19. L’employé-e refuse donc de travailler. Peut-il/elle être obligé-e à venir travailler ?
De manière générale, l’Ordonnance 2 COVID-19 stipule l’obligation des employeurs de laisser les personnes vulnérables travailler à la maison. Si cela n’est pas possible en raison de la nature du travail ou de l’absence de mesures réalisables, les employeurs sont tenus de prendre les mesures organisationnelles et techniques qui s’imposent pour assurer le respect des recommandations fédérales en matière d’hygiène et de distance sociale. Si le respect de ces recommandations n’est pas possible, l’employeur doit dispenser l’employé-e et continuer à lui payer le salaire.
Ainsi, l’employé-e peut être obligé-e de se rendre sur son lieu de travail habituel tant que l’entreprise respecte les règles fédérales en matière d’hygiène et de distance sociale. S’il/elle refuse de le faire, cela pourrait en théorie permettre à l’employeur de résilier le contrat de travail avec effet immédiat. Toutefois, les circonstances spécifiques devraient être analysées avec soin à cet égard. Dans la plupart des cas, un avertissement préalable sera nécessaire.
Nous avons engagé un-e nouvel-le employé-e et avons convenu contractuellement que notre bureau serait le lieu de travail habituel. Pouvons-nous toujours ordonner à l’employé-e de travailler à domicile ? En particulier, cela serait-il possible dès le premier jour ?
Oui, cela est possible. Même si un employeur ne peut pas modifier ou adapter unilatéralement un contrat de travail, il a le droit de donner des directives générales et des instructions spécifiques concernant l’exécution du travail et la conduite des employés dans son entreprise. En outre, l’employeur est tenu de protéger les droits de la personnalité de l’employé-e. Les recommandations de l’Office fédéral de la santé publique (OFSP) sont claires à cet égard : quiconque est en mesure de travailler à domicile devrait le faire durant cette pandémie.
En principe, les outils et le matériel nécessaires pour travailler à domicile doivent être mis à disposition par l’employeur (voir aussi ici).