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Notre cadre juridique prévoit, en application de diverses lois, l’octroi d’avantages économiques en faveur des propriétaires fonciers qui entreprennent des travaux immobiliers destinés à économiser l’énergie et/ou à ménager l’environnement.
Ces politiques d’encouragement résultent d’un principe consacré par la Constitution fédérale, qui donne mandat à la Confédération ainsi qu’aux cantons de promouvoir un approvisionnement énergétique respectueux de l’environnement et une consommation économe et rationnelle de l’énergie.
De manière générale, tout ce qui se rapporte au domaine du bâti relève de la compétence des autorités cantonales.
Ainsi, la loi sur l’impôt fédéral direct (LIFD) et les lois fiscales cantonales donnent la possibilité aux contribuables qui détiennent des immeubles dans leur fortune privée de porter en déduction de leurs rendements immobiliers les investissements destinés à économiser l’énergie et à ménager l’environnement.
L’ordonnance fédérale sur les mesures en faveur de l’utilisation rationnelle de l’énergie et du recours aux énergies renouvelables (OURE) énumère de manière non exhaustive les mesures entrant dans ce champ d’application.
Il s’agit notamment du remplacement des fenêtres par des modèles améliorés sur le plan énergétique, de l’isolation thermique des sols, murs, toits et plafonds jouxtant l’extérieur, du renouvellement d’appareils ménagers grands consommateurs d’énergie, tels que cuisinières, fours, réfrigérateurs, congélateurs et lavevaisselles ou encore la pose de pompes à chaleur, d’installations à couplage chaleur-force et d’équipements alimentés aux énergies renouvelables.
En matière de législation énergétique, ce sont principalement la loi du 30 septembre 2016 sur l’énergie (LEn) et son ordonnance qui servent de bases aux différentes aides financières que l’on retrouve dans les lois cantonales.
Genève
À Genève, c’est l’article 16 alinéa 1 du règlement d’application de la loi sur l’énergie (REn) qui énumère la forme que prennent les aides financières destinées à favoriser la transition énergétique.
Conformément à cette disposition, il peut s’agir d’une subvention, d’un prêt, d’un dégrèvement fiscal ainsi que d’une réduction ou suppression des taxes et redevances pour l’utilisation du domaine public ou d’autres débours pour frais administratifs. Il ressort ainsi expressément du texte légal que ces mesures peuvent en principe être cumulées.
Le REn rappelle qu’à l’exception du dégrèvement fiscal, ces aides ne constituent pas un droit pour celui qui les sollicite.
À teneur des articles 34 alinéa 1 lettre d de la loi sur l’imposition des personnes physiques (LIPP) et 32 alinéa 4 LIFD, le contribuable qui réalise des investissements destinés à économiser l’énergie et à ménager l’environnement a le choix, d’une part, entre une déduction forfaitaire fonction de l’âge du bâtiment et oscillant au niveau fédéral entre 10 et 20%, et au niveau cantonal et communal entre 15 et 25% de la valeur locative brute ou du rendement brut des loyers et, d’autre part, une déduction des frais effectifs ainsi encourus.
Au niveau cantonal et communal, la déduction forfaitaire n’est toutefois admise que pour le ou les immeubles qu’il occupe lui-même à titre privé, à l’exclusion des autres immeubles détenus dans sa fortune privée.
Depuis le 1er janvier 2022, certaines dépenses visant à économiser l’énergie, jusque-là qualifiées d’investissements, sont désormais considérées comme des frais d’entretien si elles répondent à la définition donnée par l’Administration fiscale cantonale (AFC) dans l’annexe Notice d’Information n° 1/2022 ; conformément aux articles 32 alinéa 2 LIFD et 34 lettre e LIPP, le Département fédéral des finances détermine en effet, en collaboration avec le canton, quels investissements destinés à économiser l’énergie et à ménager l’environnement peuvent être assimilés aux frais d’entretien.
Ainsi la valeur fiscale du bien immobilier ne sera pas augmentée en pareils cas, n’entraînant par conséquent aucune hausse de l’impôt sur la fortune.
Si ces dépenses ne peuvent pas être intégralement déduites durant l’année au cours de laquelle elles ont été facturées, le solde peut être reporté au cours des deux périodes fiscales suivantes. Cette possibilité de report, introduite par une modification législative au 1er janvier 2020, doit être considéré comme un des aspects les plus profitables pour le contribuable. En effet, contrairement à tous les autres frais d’entretien et de réparation et par exemple aux primes d’assurances ou aux frais d’administration par des tiers pour lesquels aucun report sur une période fiscale subséquente n’est autorisé, l’administré dispose dans ce cas de la faculté concrète de répartir ces coûts sur plusieurs années.
Le contribuable ne peut par ailleurs revendiquer en déduction que les frais qu’il assume lui-même, à l’exclusion de ceux subventionnés par la collectivité publique, qui constituent un revenu imposable. En outre, et à côté de ces déductions liées à la fortune privée, le canton de Genève octroie une exonération complète de l’impôt immobilier complémentaire (IIC) pour une durée de 20 ans aux propriétaires d’immeubles qui respectent un standard dit de haute ou très haute performance énergétique.
En ce qui concerne les subventions et les prêts, les modalités à respecter et les conditions à remplir sont détaillées dans la loi genevoise sur l’énergie (LEn) et son règlement d’application (REn).
Cette demande de subvention doit être soumise à l’Office cantonal de l’énergie (OCEN) compétent dans le cadre de travaux de construction. Parallèlement, une demande de permis de construire doit être introduite auprès de l’Office cantonal des constructions (OAC), car les travaux sont soumis à la loi sur la démolition, la transformation et la rénovation des habitations (LDTR). Ainsi, des travaux en cours de réalisation ou déjà achevés ne peuvent plus bénéficier d’une subvention.
À l’appui de sa demande, le requérant devra produire toutes les pièces permettant l’examen de sa requête (du point de vue technique, énergétique et financier).
Avant le début des travaux, l’OCEN rend une décision accordante ou non la subvention demandée. Si elle est accordée, le requérant est encore tenu d’annoncer l’achèvement des travaux à l’OCEN, lequel peut alors procéder à un contrôle éventuel.
Finalement, ce n’est qu’à l’issue de tout ce processus que la subvention est versée, sur présentation des justificatifs.
Le prêt consiste quant à lui dans la mise à disposition, sans intérêt, d’une somme d’argent ; ses modalités et son remboursement étant fixés dans un cahier des charges.
Il sied encore toutefois de relever que l’autorité se réserve expressément le droit de retirer une aide financière déjà octroyée et exiger son remboursement immédiat par le bénéficiaire si le cahier des charges n’est pas respecté ou si le bénéficiaire l’a obtenue en fournissant des indications inexactes ou en omettant volontairement de signaler certains faits relevant pour l’octroi de l’aide financière.
Par ailleurs, il est utile de mentionner qu’une révision de la LEn est entrée en vigueur au 1er juin 20241. Ce projet prévoit notamment l’obligation pour les propriétaires de réaliser des audits énergétiques ainsi que des travaux d’assainissement énergétiques si certains seuils sont atteints. Le projet suggère aussi que l’enveloppe des subventions soit grossie de manière notable, passant ainsi de CHF 200 millions à CHF 500 millions dont le 70% devrait être attribué aux acteurs privés, et qu’un montant d’aide supplémentaire de CHF 50 millions soit débloqué pour pallier aux éventuelles incapacités financières des propriétaires. Un délai supplémentaire devrait en outre être accordé aux propriétaires de villas et petits bâtiments de moins de 5 logements pour répondre aux obligations de rénovation.
Vaud
À l’instar du canton de Genève, la législation vaudoise qui encadre les aides financières mises à disposition par l’Etat se divise entre normes fiscales et énergétiques et prévoit également que celles-ci revêtent différentes formes, soit une prestation pécuniaire, un avantage économique, un prêt sans intérêt ou à taux fixe préférentiel ou encore un cautionnement.
Dans le canton de Vaud également le requérant doit accompagner sa demande de tous les documents utiles ou requis, et tout comme à Genève, le bénéficiaire de ces aides a la possibilité de les cumuler entre elles, étant précisé que la déduction fiscale, est ici aussi limitée aux frais assumés par le contribuable lui-même.
Conformément à la législation vaudoise également, le contribuable a le choix entre des déductions effectives et forfaitaires ; ces dernières n’étant toutefois éligibles qu’à la condition que le rendement brut des loyers n’excède pas CHF 150’000. Tout comme à Genève, ces frais peuvent être reportés sur les deux périodes fiscales suivant leur facturation.
Il est intéressant de noter qu’un avant-projet ambitieux de révision complète de la loi vaudoise sur l’énergie (LVLEne) est en cours. Il s’articule autour de 6 mesures phares comprenant un important volet lié à l’assainissement énergétique du patrimoine bâti (augmentation du taux de rénovation des bâtiments et isolation, remplacement des chauffages fossiles en fin de vie d’ici à 2040 entre autres).
Le texte était mis en consultation jusqu’à la fin du mois de novembre de 2023. Il doit désormais être soumis au Grand Conseil vaudois, vraisemblablement avant la fin de l’année 2024. Les principales organisations économiques faitières du canton se sont déjà déclarées disposées à soutenir le projet à condition que le délai de 15 ans actuellement envisagé pour l’assainissement de l’enveloppe des bâtiments soit ramené à 25 ans et que les coûts des mesures proposées soient estimés.
Zurich
Dans le canton de Zurich, les investissements destinés à économiser l’énergie et à protéger l’environnement sont généralement considérés comme des dépenses fiscalement déductibles à condition de porter sur des bâtiments déjà existants. En effet, les mesures prises lors de la construction de nouveaux bâtiments ne sont pas éligibles à ce titre. Ces dépenses comprennent les mesures qui contribuent à une utilisation rationnelle de l’énergie ainsi qu’à l’emploi d’énergies renouvelables.
Du point de vue de leur déductibilité, aucune distinction n’est faite entre les dépenses d’entretien et celles dites à plus-value.
Suivant la même logique que les cantons de Genève et Vaud, ces mesures ne peuvent être dé-duites que dans la mesure où le contribuable en assume la charge lui-même, excluant ainsi les travaux ayant bénéficié d’une subvention.
Enfin, et s’agissant des frais d’entretien déductibles, si le contribuable opte pour la déduction forfai-taire en lieu et place de la déduction effective, aucun coût supplémentaire pour les mesures d’utilisation rationnelle de l’énergie ou d’utilisation d’énergies renouvelables ne pourra plus être déduit.
Le cas des bornes de recharge pour les voitures électriques
Il est encore intéressant de noter que le Conseil National vient d’accepter la motion « Déduire fiscalement les frais d’installation d’infrastructure de recharge dans les bâtiments » (objet 23.3225) visant à permettre la déduction des bornes de recharge pour les voitures électriques et ainsi inciter les propriétaires à installer ces infrastructures.
Pour l’heure, il n’existe pas de pratique établie sur cette question et le traitement de ces installations varie d’une administration fiscale à l’autre ; le Tribunal fédéral ne s’étant pour l’heure pas déterminé.
En ce sens, certains cantons tels que Genève et Vaud estiment que les bornes de recharge n’ont aucune influence sur l’efficacité énergétique de l’immeuble. D’autres cantons, au contraire, autorosent la déduction des frais d’installation des bornes de recharge uniquement si ces bornes sont reliées à un système photovoltaïque. Pour ces derniers, le recours à l’énergie verte est alors déterminant.
La date d’entrée en vigueur des modifications législatives correspondantes n’a pas encore été communiquée.
Conclusion
Les développements qui précèdent nous amènent à constater que, compte tenu de la multitude de mesures à disposition, le propriétaire qui souhaite les coordonner de façon optimale devra être conseillé.
En effet, bien que le cumul d’un maximum de mesures puisse paraître bénéfique à première vue, il pourrait s’avérer désavantageux en fin de compte. En particulier, il est essentiel de rappeler que les subventions octroyées à un particulier constituent du revenu imposable au sens des dispositions fiscale fédérales et cantonales en vigueur. De plus, toutes les mesures ne se valent pas non plus lorsqu’on prend en considération la charge administrative induite, qu’il s’agisse des délais à respecter, des documents à rassembler ou encore des contraintes liées au droit des constructions.
Pour toutes ces raisons, il est évident que les besoins et les attentes d’un contribuable à revenu modeste ne seront pas les mêmes qu’un contribuable à haut revenu déjà soumis à une charge fiscale élevée ; pour ce dernier en particulier, la planification est susceptible d’avoir une portée consi-dérable.
De la même manière, dans certaines circonstances, il pourra s’avérer plus avantageux de ventiler les frais sur plusieurs périodes fiscales alors qu’au contraire, il vaudra parfois mieux revendiquer l’intégralité au cours de la même période fiscale.
Toutes ces questions pourront être couvertes dans le cadre d’une planification consciencieuse.
1 Johner/Stucki, Historisches Abkommen zur Energiewende in Genf, MLL News Portal, [date].