Le peuple suisse est-il prêt pour un nouveau départ vers un droit du bail plus favorable aux bailleurs ?


Vos contacts

Le 24 novembre 2024, le peuple suisse a rejeté deux propositions visant à durcir les règles en matière de sous-location et à faciliter la résiliation pour besoins propres du bailleur. Ce refus soulève une interrogation fondamentale : reflète-t-il la volonté des citoyens de préserver l’équilibre actuel entre les droits des bailleurs et des locataires, dans un contexte où le marché locatif est sous tension croissante ?

Le débat sur les rapports locatifs est pourtant loin d’être clos. Une nouvelle tentative législative, cette fois-ci résolument orientée en faveur des bailleurs, se profile à l’horizon. Elle prévoit notamment de limiter les possibilités de contester le loyer initial et de simplifier la preuve des loyers usuels dans une localité ou un quartier. Ces propositions ravivent un sujet sensible et soulèvent des questions fondamentales sur l’avenir des protections offertes aux locataires en Suisse.

Le débat législatif à la Commission des affaires juridiques du Conseil national

Le 16 août 2024, la Commission des affaires juridiques du Conseil national a adopté deux projets importants visant à modifier le droit du bail. Ces initiatives visent à limiter les possibilités de contestation du loyer initial et à faciliter la preuve des loyers usuels dans une localité ou un quartier.

Les deux projets ont été adoptés avec des majorités solides (16 voix contre 6 et 1 abstention pour le premier projet, 16 voix contre 8 et 1 abstention pour le second). Ils découlent de deux initiatives parlementaires déposées par l’ancien conseiller national Hans Egloff : l’initiative 16.451, visant à restreindre la contestation du loyer initial aux cas de nécessité, et l’initiative 17.493, qui propose des critères plus précis pour prouver les loyers usuels dans un quartier.

Sur la base des résultats de la consultation, la Commission a décidé de scinder les objectifs en deux projets distincts. Elle a jugé qu’une intervention dans le domaine de la fixation des loyers était indispensable pour réduire l’insécurité juridique actuelle, qui alourdit les procédures et complique les démarches pour les parties concernées. A cela s’ajoute qu’à l’heure actuelle, les autorités de conciliation en matière de bail à loyer de plusieurs régions en Suisse font face à une surcharge importante de travail, en particulier liée aux questions de fixation de loyer.

A l’issue de la phase de débat, la Commission a choisi de suivre le texte original des initiatives parlementaires. Concernant la contestation du loyer initial, elle a décidé qu’il ne serait possible de contester un loyer que si le locataire a été contraint de signer le bail par nécessité personnelle ou familiale malgré le fait que des voix lors de la procédure de consultation craignent qu’il s’agit de critères trop vagues ce qui augmente l’insécurité juridique.

Quant aux loyers usuels, la Commission a décidé que l’existence de critères plus flexibles permettra d’établir plus facilement la comparaison avec des objets similaires, réduisant ainsi le nombre d’éléments requis pour prouver un loyer abusif. Les statistiques sectorielles pourront également être utilisées comme preuve.

Des propositions de minorité ont néanmoins été déposées, demandant que le Conseil national ne donne pas suite à ces projets et adopte plutôt des variantes qui prennent davantage en compte les intérêts des locataires, voire ceux des bailleurs.

Le Conseil national se prononcera sur ces projets lors de la session de printemps 2025.

Les conséquences pour les locataires et les bailleurs

Si elles venaient à être adoptées telles que proposé par la Commission, ces réformes du droit du bail entraîneraient des conséquences importantes pour les locataires comme pour les bailleurs.

Du côté des locataires, la restriction des possibilités de contestations de loyers initiaux aux situations de nécessité, c’est-à-dire le locataire n’ayant pas trouvé un autre objet adéquat à louer, limitera les recours en cas de loyer jugé excessif. Actuellement, il suffit d’alléguer que la chose louée se trouve dans un périmètre où sévit une pénurie de logement ou que la différence avec le loyer précédent est trop importante. De plus, s’agissant de la preuve des loyers usuels de quartier, la révision permettrait aux bailleurs de renverser plus facilement la présomption du loyer abusif que le locataire peut établir aujourd’hui en présence d’une différence importante entre le loyer initial et le loyer précédent.

Du côté des bailleurs, la facilitation liée à la démonstration de la preuve des loyers usuels de quartier leur permettra de mieux appréhender l’issue d’une procédure de contestation de loyer initial et de céder moins facilement aux tentatives de pression des locataires. En sus, la restriction des possibilités de contestation du loyer initial diminuera la crainte des bailleurs d’être attraits en justice par son locataire en cas d’augmentation de loyer. Ainsi, la révision faciliterait l’adaptation des loyers aux conditions du marché lors du changement de locataire.

La grande question est désormais de savoir comment le rejet des deux votations de novembre 2024 influencera les futures campagnes politiques concernant les deux propositions de révision du droit du bail et leurs résultats en votation.


Partager l’article



les plus lus


Highlights

MLL Legal

MLL Legal est l’une des principales études d’avocats en Suisse, avec des bureaux à Zurich, Genève, Zoug, Lausanne, Londres et Madrid. Nous conseillons nos clients dans tous les domaines du droit des affaires. Nous nous distinguons en particulier par notre expertise sectorielle de premier ordre dans les domaines spécialisés techniques et innovants, mais aussi dans les industries réglementées.

MLL Legal

Newsletter

MLL Real Estate Legal Update 01/24. Notre dernière MLL Legal Update Real Estate est désormais en ligne. Vous y trouverez plusieurs articles rédigés par nos spécialistes en droit immobilier, couvrant diverses thématiques d’actualité. Nous vous en souhaitons une bonne lecture.

Accéder à la Newsletter 01/24

S’inscrire

Notre histoire

MLL Legal est une étude d’avocats suisse de premier plan dont l’histoire remonte à 1885. L’étude s’est développée à la fois de manière organique et par le biais de fusions stratégiques, dont la dernière a eu lieu le 1er juillet 2021 entre Meyerlustenberger Lachenal et FRORIEP.

Cette fusion fait de MLL Legal, une nouvelle entité combinée, l’un des plus grands cabinets d’avocats d’affaire de Suisse, avec 150 avocats répartis dans quatres bureaux en Suisse et deux bureaux à l’étranger, à Londres et à Madrid, au service de clients recherchant des conseils en droit suisse.

Notre étude a un profil international fort et réunit un leadership et une expertise reconnus dans tous les domaines du droit qui touchent le monde des affaires aujourd’hui, avec un accent sur les secteurs de la haute technologie, l’innovation et la réglementation.

A propos de nous
 

Publications

Cliquez ici pour accéder à nos dernières publications.

COVID-19

Lisez toutes nos mises à jour juridiques sur l’impact de COVID-19 pour les entreprises.

COVID-19 Information

Postes vacants

Vous cherchez un nouveau défi ?

Nos équipes talentueuses et ambitieuses sont motivées par une vision commune pour réussir. Nous apprécions la communication ouverte et directe à tous les niveaux de l’organisation dans un environnement de travail favorable.

Postes vacants

Nouvelles de l’étude

Cliquez ici pour les dernières nouvelles de l’étude.

Notre équipe

L’environnement réglementaire et technologique exige continuellement des entreprises qu’elles s’adaptent et évoluent.
MLLL compte plus de 150 avocats, qui innovent en permanence et cherchent constamment à améliorer leur pratique. Nous adoptons de nouvelles idées et technologies, en associant notre riche expertise à une pensée créative et réactive. Grâce à notre approche pratique, nous mettons en œuvre des solutions viables pour répondre aux défis juridiques les plus complexes.

A propos de nous notre équipe.

Droit de l’immobilier et de la construction

Découvrez nos articles au sujet du droit de l’immobilier et de la construction.
Droit de la construction

MLL Legal sur les médias sociaux

Suivez-nous sur LinkedIn.