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Le 16 décembre 2022, le Conseil fédéral a présenté une modification de la Loi sur la protection de l’environnement (LPE) dans le but d’améliorer l’assainissement des sites contaminés, mais également de répondre aux défis posés par l’urbanisation croissante et la protection contre le bruit. Parmi les objectifs principaux de cette révision figure la meilleure coordination entre le développement de l’urbanisation et les exigences liées à la protection contre le bruit. Après la publication du message du Conseil fédéral, deux allers-retours ont eu lieu entre les deux chambres du Parlement pour résoudre les divergences. Finalement, le 23 septembre 2024, le Conseil national a approuvé la version définitive du projet de révision. La date du vote final n’est toutefois pas encore fixée.
Cette révision de la LPE soulève une question importante pour l’aménagement du territoire en Suisse : facilitera-t-elle la conversion de bureaux en logements, particulièrement dans les zones urbaines ?
Meilleure coordination entre urbanisation et protection contre le bruit
L’un des axes majeurs de cette révision de la LPE est la volonté de mieux intégrer les exigences liées à la protection contre le bruit dans la planification et la construction de nouveaux logements, en particulier dans les zones déjà bâties.
La solution retenue comprend, d’une part, une nouvelle réglementation concernant les permis de construire (art. 22 LPE). Les critères relevant de la législation sur le bruit pour l’octroi de permis de construire dans des zones affectées par le bruit sont ainsi formulés plus clairement dans la loi, de manière à renforcer la sécurité du droit et de la planification.
La solution retenue propose, d’autre part, une nouvelle réglementation concernant les modifications des plans d’affectation (art. 24 LPE). Lors de la délimitation de zones à bâtir et de l’accroissement de l’espace habitable dans des zones affectées par le bruit au moyen d’un changement d’affectation ou d’une densification, il sera possible de déroger aux valeurs limites d’exposition, à condition que le développement de l’urbanisation vers l’intérieur du milieu bâti présente un intérêt prépondérant, qu’un espace ouvert public servant à la détente soit accessible à pieds et que des mesures garantissant une qualité de l’habitat appropriée du point de vue sonore soient définies et intégrées dans la planification.
Cela signifie que les zones existantes pourront être densifiées, à condition que des mesures soient prises pour garantir une bonne qualité de vie, notamment en termes de protection contre le bruit. Des espaces ouverts destinés à la détente devront également être prévus lors de la transformation de bâtiments ce qui représente une exigence cruciale pour les futurs projets de conversion des surfaces de bureaux ou de bâtiments industriels / artisanaux en surfaces d’habitation.
En réponse à la demande croissante de logements en milieu urbain, cette révision favorise ainsi le développement de l’urbanisation vers l’intérieur. Elle accroît la transparence de la réglementation pour tous les acteurs ainsi que la sécurité juridique. Elle permet notamment de renoncer à la pesée des intérêts qui était nécessaire jusqu’ici pour les autorisations exceptionnelles ainsi qu’à l’accord du canton.
Les défis liés à la révision de la LPE et la protection contre le bruit
Cependant, des défis à la transformation de surfaces commerciales en habitation continuent à exister. Bien que la révision vise à renforcer la coordination avec la protection contre le bruit, la conversion de surfaces commerciales situés dans des zones fortement exposées au bruit reste délicate. Il faudra non seulement s’assurer que ces bâtiments offrent une isolation phonique adéquate, mais également que les espaces extérieurs attenants soient suffisamment calmes et agréables pour les futurs habitants. La création d’espaces ouverts pour la détente, comme mentionné dans la révision, pourrait représenter un défi supplémentaire dans des zones où l’espace est limité.
Le Conseil fédéral ne s’attend pas à un effet négatif sur la protection de la santé de la population contre le bruit, car les nouvelles dispositions correspondent déjà à la pratique actuelle d’un grand nombre de cantons, qui autorisent de très nombreuses exceptions par rapport au droit en vigueur. La sécurité juridique, sensiblement plus grande, pourrait même contribuer à améliorer la protection contre le bruit. Par conséquent, les experts consultés par le Conseil fédéral s’attendent à ce que les nouvelles dispositions n’influencent pas, voire influencent légèrement et positivement, la protection contre le bruit.
Concernant les prix de l’immobilier et les loyers, deux évolutions s’opposent. Si l’extension de l’offre dans les grandes agglomérations devait permettre d’atténuer quelque peu les prix sur le marché local, les exigences supplémentaires pourraient entraîner une (légère) augmentation des coûts de planification et de construction qui sera pris en compte dans le cadre de la détermination du prix de vente, respectivement du loyer. De manière globale, l’impact sur les prix devrait être très faible.
Conclusion
La nouvelle révision de la LPE marque un pas important vers une meilleure intégration de la protection contre le bruit dans les projets de densification urbaine, y compris la conversion de bureaux en logements. Elle offre un cadre juridique plus clair et plus sécurisant pour les promoteurs immobiliers, tout en garantissant la tranquillité des futurs habitants. Toutefois, la réussite de cette transition dépendra de la capacité à surmonter les défis liés aux nuisances sonores dans certaines zones urbaines, ainsi que de la création d’espaces ouverts de qualité.
Les responsables de ce type de projet de transformation devraient également garder à l’esprit les autres règles légales susceptibles à s’appliquer, en particulier le cadre légal de l’aménagement du territoire et de la protection du patrimoine. Il faudrait également être attentif aux questions découlant du régime de la Loi fédérale sur l’acquisition d’immeubles par des personnes à l’étranger (LFAIE) qui permet seulement à un cercle limité d’acquérir des biens-fonds destinés à l’habitation.
En définitive, si la révision de la LPE est correctement mise en œuvre dans la pratique, elle pourrait, dans une certaine mesure, faciliter la transformation des surfaces commerciales en logements, contribuant ainsi à atténuer la pénurie de logements dans les centres urbains.